4 – Aider les élèves à exercer leur esprit critique dans la vie quotidienne

  • L’enseignement de l’esprit critique doit s’ancrer dans la réalité de l’enfant et trouver sa place dans son quotidien.
  • Enseigner l’esprit critique, c’est aussi devenir soi-même un expert dans un domaine, même restreint, « pour voir l’effet que cela fait » !

Nous mobilisons en permanence nos outils d’évaluation des informations, depuis notre plus tendre enfance. Nos critères d’évaluation et de confiance nous servent à prendre en permanence des décisions. Cependant, l’action de nos outils ne se restreint pas à des problématiques particulières ou précises. Si l’objectif est d’outiller l’élève pour qu’il puisse faire face aux grands débats de société, particulièrement complexes à s’approprier, nous devons en amont nous appuyer sur un travail régulier et quotidien de notre raisonnement. 

Quelqu’un affirme que la « tartine tombe toujours du mauvais côté ». Comment savoir si la personne dit vraie ? D’abord, en évaluant la source de l’information, son honnêteté, son expertise ? Puis en évaluant les preuves qu’elle avance, leur quantité, leur qualité et leur pertinence ? Être nous-mêmes capables de produire de telles preuves (par exemple, connaître les bases d’un protocole expérimental) nous aidera aussi à les évaluer. L’esprit critique peut se voir comme un entraînement pour mieux raisonner et mieux évaluer les idées des autres… et les nôtres.

Pour développer l’esprit critique de l’enfant/l’adolescent, nous devons nous rappeler que c’est une pratique qu’il exerce spontanément. L’objectif est de lui donner les moyens de développer ses outils naturels de manière aussi fréquente que possible, et dans des situations toujours plus complexes. C’est en lui présentant des contextes adaptés à son questionnement et à ses difficultés qu’il pourra progresser, et non en le soumettant à des domaines plus lourds, plus chargés, comme des théories du complot.

Nous ne sommes pas pour autant obligés de partir de situations d’enseignement décontextualisées comme dans le cas de la tartine ! En réalité, deux approches sont possibles :

  • partir de petites problématiques du quotidien (quelqu’un affirme que…). Nous cherchons alors le moyen de produire la réponse la plus fiable possible (pour convaincre un jury par exemple) : est-ce qu’appuyer sur les boutons au niveau du passage-piéton fait passer le feu au rouge ? Est-ce qu’il pleut plus quand nous faisons notre brushing ? Le métro d’en face arrive-t-il toujours en premier ? De telles problématiques peuvent être le point de départ d’une analyse amusante de nos façons de raisonner et une motivation pour chercher les outils de la science à notre rescousse ;
  • partir de problématiques de sciences : comment établir l’origine d’une maladie ? Comment savoir si une population animale est en danger ? Nous affirmons que le réchauffement climatique est dû aux activités humaines : comment le savons-nous ? Dans chacun de ces cas, nous étudierons les outils et méthodes mis en place par les scientifiques pour évaluer différentes hypothèses et établir la meilleure connaissance possible. Nous chercherons ensuite en quoi des situations de notre vie quotidienne peuvent mobiliser les mêmes outils ou des outils adaptés pour aller au-delà de nos limites naturelles de raisonnement.

Par ailleurs, nous raisonnons mieux lorsque nos connaissances sur un sujet sont solides. S’approprier les outils de l’esprit critique est donc plus aisé sur un thème que nous maîtrisons. Nous comprendrons plus facilement l’intérêt d’adopter telle compétence ou telle attitude et nous serons peut-être plus aptes ensuite à les transférer à de nouveaux sujets. Avoir eu la sensation de donner une explication sur la base d’observations insuffisantes n’est pas si fréquent dans la vie quotidienne – alors que nous le faisons tout le temps ! Mais si nous sommes confrontés à un sujet dans lequel nous tentons de développer notre expertise, nous prendrons plus facilement conscience de nos stratégies. Nous émettrons des hypothèses et les testerons… et nous disposerons de retours sur notre efficacité ! Nous réaliserons alors qu’un raisonnement plus structuré et plus outillé est une garantie d’efficience. En cherchant à devenir experts dans un domaine (la production d’origamis, la reconnaissance des constellations…), nous pouvons plus facilement comprendre l’intérêt d’avoir des bons critères au moment de jauger la pertinence d’une information ou d’une source d’information.